Les murs ne protègent plus

Les murs ne protègent plus

Thekla – shakoul 1

Ma fille a peur d’être kidnappée.
La nuit, vois-tu,
le jour aussi,
les murs ne la protègent plus.
La pierre, la brique, le béton et la porte de bois,
les verrous, barillets, cylindres et serrure,
la nuit vois-tu,
le jour aussi,
les murs se tordent
de la douleur de n’être plus,
pas même l’illusion d’un abri.

Les mères voudraient reprendre l’enfant dans leurs ventres.
La nuit, vois-tu,
le jour aussi
les murs explosent sous l’impact des bombes.
Les mères accouchent
de gravats, d’ossuaires et de cendre.
La nuit vois-tu,
le jour aussi,
des enfants pleurent
sous les murs de leurs maisons
éventrées.

Nos ventres s’écroulent ou se dissolvent.
La nuit vois-tu
le jour aussi,
nous sommes des mères
et nous marquons
le corps de nos enfants
pour retrouver leur trace
dans la forêt des murs
calcinés.

Ma fille ne sera pas kidnappée.
Ailleurs, les murs avalent
les corps d’enfants démembrés.
La nuit vois-tu,
le jour aussi,
nos ventres crient.
Y a-t-il pire catastrophe
que celle d’effacer le nom
de nos enfants massacrés ?

Myriam Dhume-Sonzogni
5 novembre 2023

_____________________________
1. « En français ou en anglais, on souligne parfois qu’il n’existe pas de mot pour désigner une personne qui a perdu son enfant, un équivalent du mot « orphelin » pour un parent, tant cette situation n’est pas dans l’ordre des choses. Il se trouve cependant que ce mot existe dans deux langues, l’arabe où il se dit thekla, et l’hébreu où il se dit shakoul. Pour éviter que ces deux mots ne deviennent des lieux communs, le seul moyen est d’arrêter aujourd’hui la vengeance en cours à Gaza, quelles que soient les atrocités qui l’ont déclenchée et les raisons plus anciennes qui ont pu catalyser ces dernières. » Médiapart/ 4 novembre 2023
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Renaître

Renaître

S’endormirait-il ce soir
— l’horizon ?
S’endormirait-il vraiment
à l’instant creux
d’un rêve
inachevé ?
Tu aimerais
— mourir et renaître comme à chaque nuit
fondue dans le vol d’une chimère.
Tu aimerais
brouiller
le sillage
des formes claires,
cracher depuis ta gorge de chatte
des couchants de ciel pourpre.
Tu aimerais comme à chaque nuit — mourir et renaître en rafales,
gardant sur ta peau
le souvenir
d’avoir été la promesse
de mille corps
dans le creux d’une goutte
— une mémoire à défaire
dans l’oeil unique
d’une cellule.
Mourir et renaître sur la paupière d’une broussaille
— visage défait et à refaire
S’endormirait-il ce soir l’horizon ?

Faudrait-il renaître du même au même sur fond d’ennui dupliqué ? Humaine et non végétale, flore sans rien de faune, faudrait-il baigner chaque soir dans le verre d’une éprouvette, errer dans les couloirs d’une utopie désaffectée, courir encore pour échapper au vertige des miroirs ? Faudrait-il naitre et ne plus mourir, croire à l’identique, au pérenne, à l’immuable ? Faudrait-il se soustraire à jamais à la sabbat des métamorphoses ?

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De petites mémoires palpitent

De petites mémoires palpitent

Par la fenêtre entrouverte, tu entends la renarde glapir. Plus loin sur le versant le taillis se déchire en brefs éclats sonores. Cri silence cri, la nuit hoquette et puis se tait. La renarde glapit, le silence convulse et puis l’aube se tait encore, repue de phéromones.

Tu entends craquer ta peau.

Dans ton ventre

une forêt froisse et s’étire,

usant patiemment l’envers de tes parois.

De petites mémoires palpitent sur ta peau.

La paume de ton sein, ta main,

le téton qui se dresse, rose vire écarlate

Tu abrites dans ton corps un paysage en expansion.

Tes lèvres, tes dents,

le filet de salive coulant sur ton menton.

Dans les miroirs

ton reflet est une image en sursis

déflorée bientôt

par l’ébullition des cosmos.

Muer ? L’envers de tes doigts déjà se fissure.

Ta vulve tes lèvres et le filet de salive s’écoulant de ta grotte.

Peau à peau tu t’effiloches

en longues traînées de soie

spiralant l’hybride des formes à naître.

Tu es une étoile brillante de l’anneau.

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maintenant le feu !

La nuit parfois cela t’arrive. Le flux.

Tu frémis jusqu’à l’extrémité de tes parois

sous la caresse naissante de l’espace flou.

Sur ta peau fleurissent milles perles de sueur -bleuet,

éclaboussant le ciel à des années-lumières autour de toi.

La nuit, de ta chair humide et dense monte le fumet de la terre noire des confins.

Tu es une planète d’eau et de sable couvant sur ton nid de brasier

des mots tectoniques. Le flux.Tu le sens

dans le désordre de tes intuitions

percuter ta surface comme un essaim de météorites.

Tu vaporises tu t’évapores tu te buées dans l’espace

tandis que ta gorge tandis que tes lèvres

projettent à des années-lumière autour de toi

l’aboiement rauque des étoiles.

Ici maintenant tu le sens

Ton ventre gorgé de novas

qui n’en finissent pas d’éclater tes entrailles.

Tu es une multitude d’explosions

dans le ciel

à toi seule,

volcanique

atome

irradiant les poches de l’horizon sans rivage.

Tu es la joie, tu es la colère, tu es le désir.

… Maintenant le feu !

Myriam Dhume-Sonzogni
janvier 2018
maintenant le feu !
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Au jardin des poètes

Au jardin des poètes

au jardin des poètes - Daniel Kieffer et Myriam Dhume-Sonzogni

MDS
Invitation au partage de Daniel Kieffer (épisode 20 de la série:  Daniel, tonton et Mylène)
07.04.2020

D’incertains jours s’improvisaient victuailles
à nos faims sourdes d’utopie véritable.

Nous respirons désormais à cycle inversé,
exhalant du fond de nos ventres
quelques bulles d’illusions
à déraison
salutaire.

Notre rêve en ce jour est un déplacement à vivre en première nécessité.

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murmures

murmures

Nous en étions là — mur
en première ligne saturée des espaces clos — mur
dont nous ne savions plus — mur
géométriser les issues — mur —mur — mur.

Qu’étais-je d’autre sinon une feuille figée dans le temps de son envol ?

— mur — mur — murmure
des vents dormant dans l’interstice de nos défaites,
y croyons-nous encore ?
Nous sommes de la lignée des souffles
porteurs de bouleversements
aux destins asymétriques.

Délignant l’escarpement
murmures — de nos peurs
à l’envers du couchant.

Nous croissons dans les marges, côtoyant d’improbables soleils.

MDS
Merci à l’ami Martin Ott dont l’oeuvre — ici reproduite — a fait naitre le poème.
25.03.2020
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Nous sommes ici. We are here V.

Nous sommes ici. We are here V.

Dans mon pays, on laisse reposer les routes à l’entrée de la nuit.
La chaleur d’un feu n’est jamais refusée,
on fait assoir celui qui voyage.
Au matin, personne ne confisque l’ombre de celui qui repart.

On mange avec celui qui mange, on chante avec celui qui chante.
Dans mon pays, aucun père ne pleure seul sans que l’on pleure avec lui
l’encre effacée du prénom de son fils.
Il y a des palmeraies dans mon pays où il fait bon prendre le thé avec un ami.

Dans mon pays, certaines questions s’envolent avant d’être posées
le silence n’est jamais insistant
on n’en demande pas plus aux douleurs aphones.
On sait que mille anges dans le ciel n’égaillent pas une aube éplorée.

Dans mon pays, on ne soupèse pas la cicatrice de l’homme mis à nu.
On ne sonde pas la pupille de son œil,
on ne soutire pas l’empreinte de ses doigts.
Dans mon pays… ô mon pays…

Mon pays a pris feu à l’intérieur de mon âme,
au fond de la nuit
bleue et sans larme.

avril 2018

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Nous sommes ici. We are here IV. Dans le camps.

Nous sommes ici. We are here IV. Dans le camps.

Il reste un peu d’or au fond de notre œil.

Parfois nous pensons au pays.
Nous pleurons, nous rions,
l’un d’entre nous chante parfois
et sa voix perce la gorge des parois
qui, sans voie nous assignent.

Mais ne croyez pas cela,
ne croyez pas que nous rêvions en couleurs
ne croyez pas que nous rêvions encore.

Croyez-vous seulement que nous dormions encore ?

Novembre 2018

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Nous sommes ici. We are here III.

Le long de vos prairies, aux abords de vos fermes
Nous avons déposé nos bagages
et nous avons attendu.

Que votre blé monte et qu’il soit moissonné.
Que les oiseaux du sud nichent et qu’ils s’en retournent chez eux
Que vos fruits mûrissent et puis qu’ils se dessèchent
Que vos montagnes s’éclaircissent et puis s’éloignent.
Nous avons attendu.

Le ciel n’était plus le ciel, le ciel n’était plus le sang,
le ciel était vert de cette attente qui n’en finissait pas
de recouvrir la peinture de notre âme.

Nous étions fait de mousse, nous étions fait de nuit
le cœur aussi lourd qu’une souche
sans faîte et sans racines.

A quel monde appartenons-nous encore ?

janvier 2018

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Nous sommes ici. We are here II.

Nous sommes ici. We are here II.


Là où les nuages se sont arrêtés,
au pied de vos montagnes,
nous nous sommes assis.
Le blé levait dans vos champs,
semblable au blé qui levait dans nos champs
avant.

Avant que les oiseaux noirs ne viennent
chez nous. avant.
l’effroi. avant. la perte. avant.
la route.
avant, before.

We sat down.
Votre blé parlait notre langue alors nous nous sommes assis.
Le long de vos prairies, aux abords de vos fermes,
nous avons déposé nos bagages.
Finally. Enfin.

Devant nous, la plaine était bleue,
semblable au bleu qui levait le fond de nos âmes.
Alors nous nous sommes assis.

31 janvier 2018

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Nous sommes ici. We are here l.

Nous sommes ici. We are here l.

This is my testimony, ceci est mon témoignage.
L’horizon était d’acier alors nous sommes partis,
quand la rouille menaça de prendre nos âmes alors nous sommes partis.
Il est risqué dans la vie de ne pas prendre de risques
car la vie elle-même est un risque, life herself is a risk,
alors nous sommes partis.

Nous avons mis nos pas dans les pas de la route.
Pour longtemps et pour si peu.
Le désert succédait au désert, le cuivre succédait au cuivre
pour longtemps et pour si peu, bravant l’hostilité du sable
nous avons prié sans fin pour qu’au devant de nous
les couleurs redeviennent des montagnes.

Nous étions vivants mais pour combien de temps encore?
Les montagnes ne nous cachaient pas, les gens ne nous cachaient pas.
Nous étions vivants, seuls, impuissants et la poussière des prisons suffoquaient nos poumons.
Alors nous sommes partis
and we ran to the sea et nous avons couru vers la mer.
Le bleu des eaux nous parut plus beau que le chant des ancêtres.

Nous ne le savions pas.
La mer est belle mais ses larmes sont acides.
Le bleu mordit nos cuisses et arracha notre peau,
la vague engloutit le chant de nos ancêtres, nous ne le savions pas,
la mer n’est pas un lieu que l’on parcourt
the sea is not a road, la mer n’est pas une route.

Nous sommes vivants et ceci est notre témoignage
pour nous-mêmes et ceux qui n’y sont pas arrivés
pour nos amis, nos frères, pour ceux que la route a mangés.
Nous sommes là devant vous et notre cœur est vibrant,
notre corps est meurtri nos âmes sont meurtries, mais notre volonté est d’acier.
Nous avons pris la mer et nous n’en sommes pas morts.

Ecoutez notre chant. Il coule dans nos veines plus fort que le cuivre plus bleu que la mer,

écoutez notre chant, listen to our song.

  19.10.2017
* Les paroles en italiques sont extraites du film Fuocoammare, par-delà Lampedusa de Gianfranco Rosi. Pour ces paroles, il y a un chanteur et un choeur d’hommes dont je ne connais malheureusement pas les noms. Je leur dédie ce poème.

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Verticale

Verticale

 

Verticale
A pleine sève
En plein cœur
Le tronc dévasté s’élance encore
Courant le rythme de la paroi
Traversière.

Dans le creux du temps
Cheveux d’ange
Autour du cœur exsangue
S’organisent les floraisons
Arc en terre
Murmure du faisceau
entre l’assise écorcée

Tu es là,
sur le tronc froid,
lorsque, dormant de la défaite de l’arbre,
l’absence n’est plus le rien,  l’élan court encore.

2009

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L’heure blanche

L’heure blanche

Tu la connais
cette heure blanche qui pépie.
L’imaginerais-tu bleu évanescente
comme un rêve posé entre loup et chien?

Tu la connais soif, tu la connais rosée
mouillant l’iris tendre du matin.
Tu la connais veille, tu la connais souffle,
elle qui, de ses mille doigts, écarte les plis de la broussaille.

De merle à merlette, d’ombre à soif,
l’heure porte la sueur des faims grêles aux patiences si fines.
La nuit hésite encore quand le jour regarde déjà,
Le contour des êtres s’outremer, l’aube soulève le noir du creux des arbres.

2009

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Tu ne le sauras pas où arrêter ton pas…

Tu ne le sauras pas où arrêter ton pas…

Dans le dessin de la brume,
tes lèvres écalées par les baisers du vent,
pour l’aveugle chevauchée, pour l’obstination débridée,

Toi, l’éternel pèlerin
Toi, la flamme ardente
Toi et ton éternelle confusion,
Le nom se perdra des ombres fauchées sur le flou de tes songes.

Tu ne le sauras pas où arrêter ton pas…
L’abri erratique au dessin toujours imparfait
Rêves échevelés, ton appétit ardent
Tu cours sans mesure, défiant le temps.

Toi, l’éternel feu
Toi, le cœur trop ardent
Pour toi, la simple certitude aubépine
de l’attrait des vents et l’ombre sèche des soifs infidèles.

2009

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Il arrive

Il arrive

Il arrive que l’on trouve au pied des montagnes
de quoi arrêter nos soifs et calmer nos impatiences.

Le paysage pleut en nous des paillettes de cime
et nous créons des oiseaux s’envolant du bleu de l’ombre.

Il arrive que nous réussissions à goûter la saveur de l’air,
rassemblant l’horizon au creux de nos paumes.

Magiciens nous réconcilions les parts désunies,
magiciens toute contradiction s’éloigne enfin.

Il arrive que l’un ne soit plus seul
dans l’immense vertige des pays éclatés

Le jour nous meurt soufre
quand les larmes nous renaissent à clarté.

Il arrive que du plus nu de la falaise
nous revienne l’écho des voix oubliées
perçant le silence des chants précoces

Nous entendons alors du bout de nos doigts engourdis
sourdre battements de semence hors du temps minéral.

2009

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L’invisible est pierre si dure

L’invisible est pierre si dure

N’approchez nul de qui travaille en son sommeil

Son immobilité gardienne des passages draguant l’âme

Il dort le monde, infuse sa rêverie

Il est le sculpteur, le bâtisseur qui enfante,

Lui, l’ami de la forme qui se dérobe encore.

 

a- t-il déjà voit-il séant s’est-il cri soulagement cri perdu pourtant

toujours et si longtemps vivra- t-on jamais le verrons-nous quand

sera-t-il des songes secouer délivrer ici le ramener pourquoi autant

aller si loin lui pauvre et vieux tellement abîmé en vaut-il peine mais

 

L’invisible est pierre si dure qu’il faut, de la rosée de nos absences,

L’amollir au temps, finement tailler buée en cristal de brume.

2009

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Le lieu n’est pas celui d’un poème

Le lieu n’est pas celui d’un poème

Le lieu n’est pas ici celui d’un poème. Une verrière urbaine sur la nuit ferroviaire. Ceux qui arrivent prennent place de ceux qui repartent, ceux qui partent essaieront d’arriver cette nuit encore.

Routes sur des rails, nous courant l’air
ici, dans la salle de nos pas éperdus.

Coulés en vertèbres métalliques, nos corps sans dossiers ont soif d’équilibre. Désaxe hors de nuit, le siège nous refoule inexorablement

Ne reste pas voyageur longtemps immobile…
ici dans le cimetière sans tourbe d’une attente perdue

Devant moi, elle. N’est pas ni tendre ni figure de poème. Elle. Il y a ses sacs. Ils ne repartent pas.
Immobiles et le ventre crevé

Ses sacs sont à demeure
ici même au vestibule crochu des âmes éperdues

Sinon cette couverture roulée sinon des cartons en attente sinon des journaux où elle n’est pas
encore. Autrement rien. Elle dort. Essaie. Sursaute.

La nuit en une partance fracturée
la nuit ici plutôt qu’ailleurs, dormir ici nos rêves à nu

Sa tête comme immergée dans un bain de nuit. Elle plonge manque de souffle. Dort essaie sursaute, son sommeil est une douleur pourtant

Le pire ici n’est pas encore
quand la buée joue sur les vitres une larme plutôt qu’un vide

N’ont retenu que la poussière, ses ongles maculés de nuit. Elle. Encache son visage entre ses mains.Berce sa peur, retient son ventre. Elle que le sommeil récuse, le songe est son ennemi

aimerait sans doute être boule ailleurs plutôt qu’ici,
souche plutôt que ronce,amas sans saillance

Serrant des mains un rêve perdu ou fracturé, elle dormant sans nuit sursautant sa flamme. Respire encore, elle sursoit à la poussière. Sursaute, dort, essaie. Survit

Une soeur,
partageant l’orée de notre peur.


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Un ange est venu

Un ange est venu

Un ange s’est posé sur l’arbre rouge à la cime tronquée
L’air est transparent,
Le magnolia étourdit à poing fermé
le vent,
qui n’a de prise sur ses pétales
aujourd’hui.
Demain
il fera floraison.
Qu’il prenne le temps
de nous laisser jouir encore de sa promesse,
Demain l’ange s’envolera lever d’autres éphémères.

mai 2013

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Parfois je disparais

Parfois je disparais

Parfois je disparais.
Immense est la douleur.

La nuit monte,
Elle n’est pas noire
Sa transparence est un vertige dans laquelle je me dissous encore.

Il y a des amarres
il arrive que la nuit les fasse fondre
et je ne suis plus rien
d’autre que ces mots sur la page.

J’écris comme on allume des lampions dans la nuit
pour donner corps aux ombres derrière moi.

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Kalachnikovs

Kalachnikovs

Il nous faut pourtant des forces pour continuer encore.
Ce soir la fatigue est grande,
la tristesse comme un froid qui nous mord du dedans.
Autour de nous, l’air déchiqueté en éclats irrespirables.

Kalachnikovs
Cette facilité du sang, contagion de la haine, la réalité d’une fracture,
ce soir, la peur est ce lit dans lequel nous nous coucherons
les os fendus et la chair à vif.

Que jamais nos jardins ne deviennent exsangues, plus faibles que les terres de cendre.
Que la pluie sur nous soit toujours aussi douce, que jamais elle ne nous transperce d’un froid
sans remède,
et la rosée, qu’elle reste translucide au matin et jamais n’ensanglante le cœur des corolles.

Notre peur n’est pas de mourir
Nous pourrions ne faire que passer,
Partir et laisser d’autres cultiver nos jardins.
Mais ce soir la fatigue est grande, nous pleurons sur ce qui grandit comme un trou d’ombre au loin,
pas si loin, nous pleurons sur les chemins humides
Dont les flaques rouge-sang nous avaleraient comme des bouches avides.

Il nous faut pourtant des forces pour continuer encore.
Nos fils et nos filles au regard tendre,
leur douceur si chère à notre âme.
Nous avons voulu pour eux la beauté du jour tissée d’ombres délicates
espérant toujours dans le pouvoir de la dentelle quand

kalachnikovs, notre peur n’est pas de mourir.
Que les graines ne se dénaturent , qu’aucun arbre ne pousse chargé des fruits de la cendre,
Tout, hormis le non-sens lorsqu’il dérègle les battements de cils du monde.
Ce soir la fatigue est grande et nous pleurons sur notre peur
de voir nos paupières murées et que l’on fige notre souffle sans nous tuer

sans nous tuer.

novembre 2016

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