Attendre que l’hiver passe

Attendre que l’hiver passe

Tu te tiens au seuil
d’une beauté en transit
à l’entre-deux d’une temporalité
fragile.

Ne sachant qui
— de toi
— temporalité
— beauté
serait la plus fragile ?

Il est question des trois ensemble. Une équation tendue aux pôles d’un monde qui se perd (et tente de dresser la liste des responsabilités.) Sur quel cadran nous sommes-nous arrêté·es ?

tu ouvres la page
— vierge
de la prairie enneigée.

Dans la nuit, la neige a bu le tracé des chemins, ouvrant une infinité de passages.
Entamer ce blanc, y défaire la clarté pure — l’oserais-tu seulement?

Tu penses à tout ce qui est et puis n’est plus dès lors qu’on s’en approche trop. Le silence des montagnes. Le chant du merle. La silhouette d’une biche caressant l’ombre du carrefour.
­— Le cri rauque des forêts sur le versant humide de l’été.

Oserais-tu brouiller ainsi l’étendue des destins inaccomplis? Tu t’intimides du calme de la prairie tandis que l’ombre
— la tienne
entre en conversation avec le blanc. Comme s’il te fallait demander la permission à la neige de ­
venir la marquer de ton pas.

*

Un œil cligne. Jaune et pâle entre deux battements de nuage. Le soleil furtivement déplace un peu de bleu sur un peu de neige. Le silence. Je l’ai entendu en ce jour sans réserve, perdu dans le chant d’un corbeau.

Myriam Dhume-Sonzogni
février 2022


photo : Martin Ott

photo : Martin Ott